France - Le casse-tête du futur passage des salles au numérique
Le rapport de Daniel Goudineau, l'ancien directeur général de France 5, sur "l'adieu à la pellicule - les enjeux de la projection numérique" dans les salles de cinéma, rendu cette semaine au Centre national de la cinématographie, propose quatorze recommandations très concrètes. Elles gravitent autour de thèmes majeurs, comme l'enjeu d'universalité des choix techniques, le maintien de la transparence et de la diversité dans la nouvelle filière de distribution dématérialisée ainsi que l'organisation d'un développement durable du secteur.
Le rapport s'ouvre sur un constat d'une franchise déconcertante : "En soi, le développement de la projection numérique ne résulte pas d'une nécessité. Ni technique ni politique." Alors, pourquoi les exploitants vont-ils investir pour abandonner les projecteurs 35 mm ? Pas uniquement parce que le risque de copies rayées disparaît complètement. Ni parce que la projection numérique ouvre la perspective du cinéma en relief. Ce choix s'explique surtout pour des raisons financières : "Les économies attendues sur le tirage des copies sont de toute évidence la source de gain la plus apparente", note l'auteur.
Cette mutation redéfinit entièrement la filière de distribution des films - du processus de transport jusqu'à la salle (disques durs numériques, réseaux haut débit, satellite...), leur sécurité (cryptage et clés). Ce qui obligera toute la filière à repenser son actuelle économie, avec l'arrêt à terme du tirage des copies ou la numérisation de la post-production.
Le rapport constate que, dans le monde, moins de 1,5 % des salles sont équipées d'un projecteur numérique (1 500 salles sur 165 000). Au Royaume-Uni, le plan lancé en septembre 2005 fixe pour objectif d'installer 250 salles d'ici à fin 2007. Aux Etats-Unis, en conservant le rythme actuel d'expansion, il faudrait douze ans pour équiper l'ensemble du parc (36 000 salles de cinémas), affirme Daniel Goudineau.
RISQUE D'HÉGÉMONIE
L'auteur parie sur une montée en puissance progressive de l'équipement des salles, à l'horizon de 2015. Ce qui ne va pas sans des soucis de transition, avec la gestion simultanée des deux techniques. Il préconise une polyvalence des serveurs de compression.
Il en va aussi de la diversité culturelle : des acteurs hégémoniques pourraient apparaître. Avec un risque de fracture encore plus grand entre les salles qui passent de gros films américains ou européens et un réseau de salles de cinéma d'art et d'essai, qui aura du mal à financer sa mutation technologique. Un pool d'investisseurs pourrait aider les indépendants et une aide publique renforcée être créée pour les salles plus fragiles, qui ne disposent que d'un seul écran.
Les Etats-Unis ont pris une longueur d'avance et les sept studios d'Hollywood ont déjà signé un accord avec les industriels Christie-AIX et Thomson/Technicolor. Au Royaume-Uni, des aides publiques sont accordées aux salles selon des critères d'engagement de programmation diversifiée.
"La projection numérique n'a de sens que si elle est alimentée en films" : cette proposition d'évidence retranscrit pourtant le principal obstacle auquel sont confrontés les exploitants pionniers du numérique : très peu de films sont accessibles sur support numérique et pour l'essentiel, ils sont américains. Si bien que le rapport appelle à ce que tous les films français soient accessibles en numérique à l'horizon 2010.
Nicole Vulser / LE MONDE / 09.09.06
Le rapport s'ouvre sur un constat d'une franchise déconcertante : "En soi, le développement de la projection numérique ne résulte pas d'une nécessité. Ni technique ni politique." Alors, pourquoi les exploitants vont-ils investir pour abandonner les projecteurs 35 mm ? Pas uniquement parce que le risque de copies rayées disparaît complètement. Ni parce que la projection numérique ouvre la perspective du cinéma en relief. Ce choix s'explique surtout pour des raisons financières : "Les économies attendues sur le tirage des copies sont de toute évidence la source de gain la plus apparente", note l'auteur.
Cette mutation redéfinit entièrement la filière de distribution des films - du processus de transport jusqu'à la salle (disques durs numériques, réseaux haut débit, satellite...), leur sécurité (cryptage et clés). Ce qui obligera toute la filière à repenser son actuelle économie, avec l'arrêt à terme du tirage des copies ou la numérisation de la post-production.
Le rapport constate que, dans le monde, moins de 1,5 % des salles sont équipées d'un projecteur numérique (1 500 salles sur 165 000). Au Royaume-Uni, le plan lancé en septembre 2005 fixe pour objectif d'installer 250 salles d'ici à fin 2007. Aux Etats-Unis, en conservant le rythme actuel d'expansion, il faudrait douze ans pour équiper l'ensemble du parc (36 000 salles de cinémas), affirme Daniel Goudineau.
RISQUE D'HÉGÉMONIE
L'auteur parie sur une montée en puissance progressive de l'équipement des salles, à l'horizon de 2015. Ce qui ne va pas sans des soucis de transition, avec la gestion simultanée des deux techniques. Il préconise une polyvalence des serveurs de compression.
Il en va aussi de la diversité culturelle : des acteurs hégémoniques pourraient apparaître. Avec un risque de fracture encore plus grand entre les salles qui passent de gros films américains ou européens et un réseau de salles de cinéma d'art et d'essai, qui aura du mal à financer sa mutation technologique. Un pool d'investisseurs pourrait aider les indépendants et une aide publique renforcée être créée pour les salles plus fragiles, qui ne disposent que d'un seul écran.
Les Etats-Unis ont pris une longueur d'avance et les sept studios d'Hollywood ont déjà signé un accord avec les industriels Christie-AIX et Thomson/Technicolor. Au Royaume-Uni, des aides publiques sont accordées aux salles selon des critères d'engagement de programmation diversifiée.
"La projection numérique n'a de sens que si elle est alimentée en films" : cette proposition d'évidence retranscrit pourtant le principal obstacle auquel sont confrontés les exploitants pionniers du numérique : très peu de films sont accessibles sur support numérique et pour l'essentiel, ils sont américains. Si bien que le rapport appelle à ce que tous les films français soient accessibles en numérique à l'horizon 2010.
Nicole Vulser / LE MONDE / 09.09.06
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home